INTERVIEW - Depuis 2011, Laurent Poupart est le directeur
de Saint-Louis-de-Gonzague, communément appelé Franklin, du nom de la
rue du XVIe arrondissement de Paris où il se trouve, 4e de notre
classement.
Laurent POUPART - Nous mettons l’accent dès l’école primaire sur l’apprentissage du français. Pour les lycéens, nous encourageons la réussite collective, plus que la compétition individuelle, et le travail de groupe. Ils travaillent en binôme à partir de l’école primaire. Au lycée, l’établissement est ouvert jusqu’à 20 heures pour leur permettre de faire leurs devoirs ensemble. Le travail en groupe est encouragé. Et puis, nous allons au-delà du programme demandé par l’Éducation nationale afin qu’ils réussissent leurs études supérieures. Nous ne les accompagnons pas que pour le bac, mais aussi pour le supérieur. Pour Sciences Po et les classes préparatoires, notamment, nous leur proposons des préparations spécifiques à l’intérieur de l’établissement. Dès la seconde, ils passent des oraux, nous leur apprenons à débattre, à construire une argumentation dans la pure tradition jésuite. Pour les échanges culturels et linguistiques, nous bénéficions de 22 jumelages dans le monde.
Seules les notes comptent?
Nous prônons une éducation complète. Pour nous, un bon élève est bon dans toutes les disciplines. Nous préparons des jeunes au concours général dans plusieurs matières, et ils sont aussi d’excellents sportifs. La dimension culturelle est aussi centrale: l’école dispose d’un théâtre et d’une maîtrise (chorale) d’un niveau égal à celle de Radio France. En sport, nous avons une équipe de rugby, de basket. Enfin, nous souhaitons qu’ils soient au service de la société, qu’ils comprennent que l’éducation qu’ils ont reçue est une chance. Nous ne sommes pas une école de la reproduction sociale. Ils ne doivent pas servir leur groupe dans un entre-soi. Ainsi, les élèves de première doivent tous accomplir une action sociale. Ils sont brancardiers à Lourdes, alphabétisent des réfugiés ou font du soutien scolaire. Enfin, il existe un fort sentiment d’appartenance à l’école. Nous avons une revue diffusée à un réseau de 12 000 anciens.
Demandez-vous beaucoup aux parents?
Oui, mais pas comme supplétifs au personnel. Nous cherchons aussi à leur transmettre nos valeurs pour qu’ils les transmettent à leurs enfants. Ils sont invités à assister aux conférences du centre culturel Franklin. C’est l’outil de diffusion des valeurs éducatives de l’école. Nous avons reçu Emmanuel Macron, dont l’épouse enseigne dans l’établissement, pour une conférence intitulée «De la philosophie à l’économie». Juste après les attentats, des représentants des trois religions monothéistes ont débattu sur le thème «Religion et violence». En janvier, ce sera «Savoir gérer son stress et maintenir sa motivation». C’est le rôle de l’école d’aider les parents dans leur rôle éducatif.
Justement, comment donnez-vous le goût de l’effort aux élèves?
Ils savent qu’en rentrant à Saint-Louis-de-Gonzague, ils devront s’investir beaucoup, et que c’est un établissement exigeant. Au lycée, ils doivent travailler entre une heure et deux heures et demie par soir. Je reconnais que beaucoup de parents paient des cours particuliers pour aider leurs enfants dans leur travail, mais aussi pour qu’ils prennent de l’avance. Ce n’est pas un phénomène nouveau. Mais nous ne l’encourageons pas. Nous ne proposons pas de stages de soutien scolaire durant les vacances à nos élèves.
Par contre, les préfets accordent chaque trimestre un entretien individuel à chacun afin de faire le bilan sur les points à améliorer et les éventuelles difficultés. Un élément essentiel de notre pédagogie. Et pour s’entraîner, nos élèves ont un devoir sur table chaque semaine à partir de la 4e, dans leur emploi du temps, et le samedi matin à partir du lycée.
Comment sélectionnez-vous les élèves?
Nous ne souhaitons pas communiquer sur ce point.